Hier, lors du débat entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, on a failli - enfin! - parler de la politique internationale de la France. Hélas, Nicolas Sarkozy a usé d'un raccourci surprenant et honteux.

Reprenons la transcription du débat:
Patrick Poivre d'Arvor : Parlons d'un continent que l'on méprise beaucoup, qui souffre, l'Afrique et le Darfour, votre politique changera-t-elle par rapport à celle de l’actuel chef de l'Etat?

Nicolas Sarkozy: Ce qui se passe au Darfour est un scandale absolu. Le fait que le gouvernement n'est pas voulu permettre les corridors humanitaires est inadmissible. Il faut que les dirigeants aient à en rendre compte devant un tribunal pénal international. Il y a 450 millions de jeunes africains de moins de 17 ans. Ils ne peuvent pas espérer venir immigrer en Europe. La question du développement de l'Afrique est une question majeure, que je traiterai dans le cadre de l'Union de la Méditerranée. Cela va de pair avec une politique d'immigration choisie en France, avec la réforme du regroupement familial. (...)
Comment peut-on passer du Darfour à la gestion des migrations en Europe? Quel est le lien? Quel est le lien entre le génocide au Darfour et le regroupement famillial?

Après la diatribe de Sarkozy, le journaliste reprend la personne et, là, surprise, au lieu de poser aussi une question sur le Darfour à la candidate, on a:
Patrick Poivre d’Arvor : Ségolène Royal, sur l’immigration ?
Merci à Ségolène Royal de ne pas avoir répondu à PPDA:
Ségolène Royal: D’abord, sur le Darfour, je pense que la communauté internationale est beaucoup trop inerte. Des pressions doivent être faites sur la Chine, y compris sur la menace de boycott des Jeux Olympiques. Je ne suis pas favorable au boycott, mais il faut poser la question pour que cela bouge et mettre fin à ses exactions. (...) quand je vois l'urgence du Darfour et le rôle que joue la Chine dans cette partie du monde, parce qu'il y a simplement du pétrole dans le sous-sol, si on renonce à toute action, alors on renonce à tout puisqu'il y a là justement ce grand événement mondial qui doit intervenir, je suis convaincue que si plusieurs pays intervenaient auprès de la Chine en disant qu’il est incompatible d'organiser les Jeux Olympiques avec la presse du monde entier qui sera là, l'opportunité de développement pour la Chine et en même temps continuer à fermer les yeux sur la question du Darfour, je suis convaincue que s'il y avait une démarche conjointe, alors cela pourrait bouger en Afrique. Je suis pour l'action, pas pour l’inaction.
Je ne sais pas si le boycott est une solution mais, en tout cas, Ségolène Royal était la seule, hier soir, à en avoir réellement parlé, à vouloir faire quelque chose (vouloir réduire le regroupement famillial pour solutionner la situation au Darfour me semble totalement «à côté des clous», pour reprendre l'expression de l'autre débat entre Royal et Sarkozy, il y a 14 ans).

Sur les JO, Nicolas Sarkozy a dit:
Je suis favorable aux Jeux Olympiques en Chine. (...) les Jeux Olympiques à Pékin obligeront la société chinoise à s'ouvrir, comme on l'a toujours vu. Le boycott en la matière est une très mauvaise idée.
Or, le boycott des JO proposés par Ségolène Royal ne visaient pas à faire évoluer la «société chinoise» mais à forcer la Chine populaire, comme Etat, comme membre du Conseil de Sécurité des Nations-Unis à lever son véto sur une intervention au Darfour. Ce n'est tout de même pas la même chose.

Et si Nicolas Sarkozy est élu, s'il faut attendre que « société chinoise s'ouvre», que restera-t-il du Darfour dans 5 ans? La solution de Nicolas Sarkozy est de recourrir à un Tribunal Pénal International mais restera-t-il des témoins? Et combien de temps faudra-t-il pour le mettre en place alors qu'on sait que le Soudan ne le reconnaîtra jamais?

Pour plus d'informations, vous pouvez aller sur Sauver le Darfour ou visiter, sur SL, Camp Darfur (découvert grâce à Nessy), l'une des parcelles les plus violentes de SL. Là, la violence n'est pas un jeu.